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Résultats du second tour

Résultats du second tour de l'élection présidentielle de 2002

Les résultats du 2nd tour validés par le conseil constitutionnel sont disponibles sur le site internet de ce dernier. Cliquer ici pour consulter ces résultats.
Tableau récapitulatif du second tour. Source : Ministère de l'intérieur


Estimation de la chaîne France 2 à 20h



La Tribune - 06/05/2002 - Jean-Marie le Pen stoppé net, Jacques Chirac joue l'ouverture


Le président a été réélu avec 81,8 % des suffrages et annonce "une politique d'ouverture et de concorde". La mobilisation de la gauche a joué à plein pour briser l'élan de Le Pen: 18,2 %. La campagne des législatives est lancée.

Les Français ont massivement voté hier pour Jacques Chirac et brisé l'élan de Jean-Marie Le Pen, tant en pourcentage qu'en voix. L'image de la France à l'étranger, sévèrement affectée le 21 avril, sort décrassée de l'épreuve. Le poids de l'extrême droite, qui avait atteint 19,2 % des voix au premier tour, est ramené à 18,2 % au second. Mais l'équation du président réélu s'en trouve compliquée dans la perspective des législatives, compte tenu de la mobilisation massive de la gauche et de l'extrême gauche hier en sa faveur.

"Le mandat que vous venez de me confier, je l'exercerai dans un esprit d'ouverture et de concorde", a déclaré Jaques Chirac dès 20 h 30, remerciant pour leur "grand élan" les Français "épris de liberté et de solidarité". Il a évoqué "la responsabilité qui [lui] incombe", insisté sur "l'appel" des Français qu'il a "entendu et compris", pour que "la nation se rassemble et que la politique change", indiquant à tous ceux qui l'ont élu: "Votre choix m'oblige." Il nommera "dans les prochains jours" un "gouvernement de mission" dont "le premier devoir sera de rétablir l'autorité de l'Etat pour répondre à l'exigence de sécurité, et de mettre la France sur un nouveau chemin de croissance et d'emploi".

Forte mobilisation.

Le président sortant a obtenu 81,8 % des suffrages exprimés selon l'estimation de l'institut CSA et le candidat du Front national 18,2 % seulement. La mobilisation a été forte: 19,7 % d'abstentions contre 28,4 % le 21 avril. Le nombre de bulletins blancs et nuls est relativement faible en de telles circonstances: 4,3 % des inscrits contre 2,4 % au premier tour. Le nombre des suffrages exprimés dépasse de quelque 2,8 millions celui du premier tour. La mobilisation a gauche et à l'extrême gauche pour battre Jean-Marie Le Pen a donc été massive, à l'échelle des énormes manifestations du 1er mai. En revanche, la mobilisation à l'extrême droite a été limitée. Le candidat du Front national, qui avait obtenu 4,8 millions de voix au premier tour, n'en obtient guère que 5,7 millions au second. C'est seulement 226.000 voix de plus que le total obtenu par l'extrême droite le 21 avril, si l'on additionne celles de Jean-Marie Le Pen et de Bruno Mégret. Moins d'un nouvel électeur sur dix. Ceux qui, dans le camp de Jacques Chirac, anticipaient une "piqûre de rappel" qui aurait nettement déplacé le curseur politique vers l'extrême droite, voient cette hypothèse démentie.


Pour être stoppée net, la montée de l'extrême droite n'en est pas moins réelle. Jean-Marie Le Pen a pu se gausser du score de son adversaire "acquis à la méthode soviétique", et prendre date: "Nous nous retrouverons aux législatives." Sa défaite, pour cuisante qu'elle soit, n'a pas entamé sa capacité de nuire: "Je n'aurai pas à attendre longtemps avant de voir se déchirer les alliés de cette coalition morbide."

Bref, trois autres rendez-vous se profilent depuis hier soir 20 heures: la nomination d'un nouveau gouvernement, les élections législatives et surtout la politique que requiert la situation créée le 21 avril.

La gauche relève la tête. "Le Pen a été largement battu par la gauche", note Dominique Strauss-Kahn, mais "les orientations politiques de la France n'ont pas été tranchées. La politique va reprendre ses droits". François Hollande a appelé à l'union pour les législatives. S'il reste peu probable que le PS remporte cette bataille, au moins peut-il espérer atténuer sa défaite si, tel Dominique Strauss-Kahn, il reconnaît "les erreurs de la campagne présidentielle et de la législature" et les corrige très rapidement.

Diagnostics difficiles.

C'est à droite que le débat est relancé entre deux visions du scrutin du 21 avril: un diagnostic très politique, qui aboutirait à un coup de barre à droite; un diagnostic plus sociologique, qui aboutirait à une politique d'ouverture répondant en priorité aux appels des Français ayant crié leurs frustrations dans les votes extrêmes, ou les ayant refoulées dans l'abstention. Depuis deux semaines, Jacques Chirac avait oscillé entre les deux voies. Le résultat d'hier l'a conduit à évoquer l'ouverture, à se poser en rassembleur, à répondre aux appels, voire à se donner quelques jours de réflexion avant de nommer le gouvernement. "Il faut prendre le temps et la mesure des choses", a résumé Nicolas Sarkozy. Mais déjà, il a clairement indiqué le thème dominant de la droite pour les législatives: "Nous ferons campagne pour que les Français donnent au président une majorité pour gouverner", parce que, "dans la montée de l'extrême droite, la cohabitation a joué un grand rôle". Après le référendum contre Le Pen, le référendum contre la cohabitation ?




Libération - 06/05/2002 - Jacques Chirac réélu par la République - Par Renaud DELY



Le président sortant profite de la forte mobilisation des électeurs au second tour du scrutin.
Avec 18% des voix, Le Pen n'arrive pas élargir le score obtenu par l'extrême droite le 21 avril.

     Un raz de marée anti-Le Pen. A l'orée de cette campagne présidentielle, le leader d'extrême droite rêvait de faire chuter son ennemi intime, Jacques Chirac. Il lui a offert une réélection triomphale. Avec près de 82 %, le président sortant décroche un bail de cinq ans supplémentaires à l'Elysée. Massive dans la rue, la mobilisation anti-FN s'est donc traduite de façon spectaculaire dans les urnes. Alors que l'abstention avait battu le 21 avril le record d'un premier tour présidentiel (28,4 %), elle a chuté hier de 8,7 points pour se limiter à 19,7 % des inscrits. Un taux inférieur à celui du second tour de la présidentielle de 1995 (20,3 %), mais supérieur aux crus élyséens précédents (15,7 % en 1988, 14,1 % en 1981).

Renforts de gauche. Jacques Chirac peut remercier les 12 millions d'électeurs qui avaient choisi la gauche plurielle ou l'extrême gauche il y a deux semaines. Suivant les consignes de la quasi-totalité de leurs chefs de file qui les avaient exhortés à «faire barrage à l'extrême droite», ils ont massivement utilisé le bulletin de vote «Chirac» pour assurer au président sortant ce score surréaliste, le plus important jamais obtenu par un candidat dans une démocratie. Un résultat incomparable aux précédents scrutins présidentiels. Jacques Chirac est également le premier président français à obtenir une majorité absolue des inscrits.

Au premier tour, le total des cinq candidats de la droite parlementaire (Jacques Chirac, François Bayrou, Alain Madelin, Corinne Lepage, Christine Boutin) n'atteignait pourtant que 33,7 % des voix. Les prétendants de la gauche plurielle avaient recueilli, eux, 32,45 % des suffrages, tandis que les trois compères trotskistes avaient porté le total de l'extrême gauche à 10,45 % des voix: ce sont ces renforts de circonstance qui ont assuré, hier, le succès imposant de Jacques Chirac. Selon une étude de l'institut Ipsos (1), 82 % des électeurs de Lionel Jospin ont rallié le président sortant. Celui-ci a également reçu le soutien de 84 % des supporters de Noël Mamère (Verts), 77 % de ceux de Robert Hue (PCF) et même de 79 % des électeurs d'Olivier Besancenot (LCR). Civisme. Au vu des premières estimations, peu d'électeurs de gauche ont manifesté leur frustration en se laissant aller à quelques facéties dans l'isoloir.

Le 21 avril, le vote blanc et nul avait battu le record d'un premier tour en séduisant 3,37 % des votants, hier, il n'a que fort peu progressé: seuls 4,3 % des votants, soit 0,5 point de moins qu'en 1995, se sont réfugiés dans ce vote stérile qu'Arlette Laguiller (LO) était la seule candidate éliminée à professer. Toujours d'après Ipsos, seuls 10 % des soutiens de la porte-parole de LO ont suivi sa consigne, 72 % choisissant de voter Chirac. Celui-ci ne saurait donc se targuer de ce vote plébiscitaire, en témoigne une projection réalisée par la Sofres (2) pour les législatives des 9 et 16 juin selon laquelle la droite parlementaire n'obtiendrait qu'une courte majorité, entre 271 à 331 sièges de députés, contre 232 à 272 sièges pour la gauche et 1 à 3 sièges pour l'extrême droite. 

Conséquence de cet impressionnant regain de civisme, Jean-Marie Le Pen a encaissé hier soir une sévère raclée. Il pouvait compter sur un magot de départ de 19,20 % des voix, addition de sa performance du premier tour (16,86 %) et de celle de son ex-lieutenant Bruno Mégret (2,34 %). Avec 18,2 %, Le Pen n'a donc pas même réussi à retrouver le niveau global atteint par l'extrême droite il y a deux semaines. D'après le sondage Ipsos, les «félons» mégrétistes n'ont pas fait preuve d'une discipline exemplaire puisque 27 % des électeurs de Mégret auraient voté Chirac. Le leader du FN avait reconnu qu'en dessous de 30 %, il considérerait son résultat comme «un échec personnel». Secrètement, il espérait même tutoyer la barre des 40 % des suffrages exprimés. Une performance qu'il ne pouvait espérer approcher que si la gauche boudait les urnes. Raison pour laquelle Le Pen déversait depuis deux semaines des monceaux d'accusation de «corruption» et de «magouilles» sur son adversaire, avec l'espoir de dégoûter les électeurs de gauche d'aller voter. Raté. 

L'échec est tel que Le Pen est même nettement battu dans les communes gérées par l'extrême droite: il n'obtient «que» 32,08 % à Vitrolles, dans le fief du couple Mégret, 34,24 % à Orange, seule mairie FN, et 39,48 % à Marignane dirigée par le mégrétiste Daniel Simonpieri, en voie de réintégration au FN. Nouveau look. Le camouflet subi par Le Pen en terme de score se double d'un échec relatif sur le plan du nombre de suffrages recueillis. Au premier tour, l'addition des voix obtenues par le président du FN et par son frère ennemi Bruno Mégret atteignait 5 471 739 suffrages. Hier, Le Pen a, peu ou prou, retrouvé le même niveau. Selon les premières estimations, il n'aurait gagné qu'entre 300 000 et 400 000 voix. 

Un signe que le patron du FN ne disposait que de réserves minimes parmi les abstentionnistes du premier tour. Selon l'institut Ipsos, 55 % d'entre eux se sont de nouveau abstenus hier, 41 % ont rallié Chirac et seulement 3 % ont choisi Le Pen, 1 % votant blanc. La quasi-totalité des 4 millions de nouveaux électeurs qui se sont déplacés l'a donc fait pour repousser le spectre de l'extrême droite. Tout au long de sa quatrième campagne présidentielle, Le Pen s'était efforcé de contenir son agressivité et d'éviter ses provocations habituelles. 

Ce «relookage», destiné à le faire paraître inoffensif, lui a permis de s'immiscer, en douce, jusqu'au second tour de la présidentielle. Hier, une fois de plus isolé à l'intérieur des frontières de l'extrême droite, Le Pen a payé plus de quarante ans d'une carrière politique qui l'ont rendu infréquentable. Et définitivement incompatible avec la République.





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