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Les résultats des élections législatives de juin 2002

Les résultats dans leur intégralité sont disponibles sur le site du ministère de l'intérieur. Pour y avoir accès cliquer ici.


Le Figaro - 08/06/2002 - Huit clés pour interpréter les résultats - Par Colette YSMAL et Sophie ROQUELLE


Multiplication des candidatures, formations nouvelles inclassables, complexité des alliances: la lecture des chiffres sera complexe

La lecture du premier tour des élections législatives va être assez complexe. D'une part en raison du grand nombre de candidatures et de la présence plus massive que précédemment de « formations politiques » plus ou moins inconnues et difficiles à classer sur l'échiquier politique. D'autre part en raison des alliances qui ont été conclues à droite comme à gauche. L'examen attentif de huit grandeurs clés devrait pourtant permettre d'interpréter le scrutin.

- 1 L'abstention

Alors que le premier tour de l'élection présidentielle avait été marqué par une faible participation signe de désintérêt pour la politique et d'insatisfaction à l'égard du choix proposé, le second tour avait, au contraire, avait donné lieu à une forte mobilisation des électeurs déterminés à éliminer Jean Marie Le Pen. D'un autre côté, on l'a vu en 1981 et 1988, lorsque des élections législatives suivent immédiatement une élection présidentielle la participation a tendance à baisser dans la mesure où les électeurs ont tendance à penser qu'en élisant le président de la République, ils ont accompli le geste décisif. Tout le problème est de savoir quel sentiment l'emportera. Une abstention autour de 20 % montrerait que le retour au civisme est confirmé. Un taux de 25 % serait un bon résultat si l'on se souvient qu'en 1997 l'abstentionnisme avait concerné 32 % du corps électoral. En revanche si 30 % des électeurs boudaient les urnes, le désintérêt pour le scrutin serait patent.

- 2 L'extrême gauche

Arlette Laguiller, Olivier Besancenot et D. Gluckstein, les trois candidats trotskistes, ont atteint 10,4 % des suffrages lors du premier tour de l'élection présidentielle. Ils ont, alors, profité d'un vote protestataire d'électeurs communistes et socialistes mécontents de la politique menée par la gauche plurielle. Les candidats de Lutte ouvrière, de la Ligue communiste révolutionnaire et ceux d'autres petites formations présentes dans toutes les circonscriptions vont-ils confirmer la percée de l'extrême gauche ? Il est assez improbable que l'extrême gauche retrouve son niveau de l'élection présidentielle. Les élections législatives, parce qu'elles ont une dimension locale qui avantage les notables, lui sont peu favorables. D'autre part un certain nombre d'électeurs ont semblé regretter, après le premier tour de l'élection présidentielle, leur vote pour les candidats trotskistes, geste d'humeur qui avait contribué à l'élimination de Lionel Jospin. Si les différentes tendances de l'extrême gauche cumulaient 8 % des voix, ce serait une confirmation de sa force et le signe que les électeurs ne se sont pas réconciliés avec les partis de la gauche traditionnelle. Un taux de 5 % serait un résultat moyen. Un score de 3 % marquerait un retour à la norme puisque l'extrême gauche avait atteint 2,6 % des suffrages en 1997.

- 3 Le Parti communiste

Le PCF a connu, lors de l'élection présidentielle, une véritable déroute (3,4 % des suffrages exprimés). Lors des élections législatives, la conjoncture est évidemment différente. D'une part le parti va bénéficier du fait qu'il est le candidat unique de la gauche dans un certain nombre de circonscriptions. D'autre part il va pouvoir compter sur ses députés sortants et sur des candidats souvent élus locaux. Dans ces conditions, si le PCF n'obtenait que 5 % des suffrages, ce serait une nouvelle défaite qui condamnerait, sans doute, le parti. Un pourcentage autour de 7 % marquerait une certaine reprise mais une reprise limitée puisque le PCF avait obtenu 9,9 % des voix en 1997. En revanche un score proche de celui de 1997 apparaîtrait comme un véritable succès.

- 4 Le PS et les Verts

Il est difficile de distinguer le Parti socialiste, les Radicaux de gauche et les Verts dans la mesure où ils ont conclu des accords électoraux et ont des candidatures communes. Mieux vaut s'intéresser au résultat de la coalition. Lors de l'élection présidentielle, Lionel Jospin, Christiane Taubira et Noël Mamère ont cumulé 23,2 % des suffrages exprimés. Pour ces élections législatives, les trois partis ont l'avantage de disposer de nombreux députés sortants qui peuvent bénéficier d'une certaine prime à l'élu bien implanté. Mais ils risquent aussi de subir les conséquences de la défaite de Lionel Jospin, qui pourraient bien démobiliser leurs électorats. Un score autour de 24 % sonnerait comme une véritable déroute. Un résultat situé à 28 % des exprimés montrerait une bonne résistance de la coalition dans une conjoncture difficile. Enfin, si le PS, le PRG et les Verts atteignaient 32 % des suffrages, on pourrait y voir le signe d'un rétablissement.

- 5 Le Pôle républicain.

Jean-Pierre Chevènement a définitivement fait sécession d'avec ses amis socialistes et le pôle républicain sera présent dans presque toutes les circonscriptions. Dans ces élections le nouveau parti joue probablement son avenir comme formation autonome. L'ancien ministre de l'Intérieur a obtenu 5,3 % des suffrages exprimés lors du premier tour de l'élection présidentielle. Si son parti retrouvait ce niveau, ce serait le succès. Un score autour de 3 % pourrait permettre au parti d'exister. Tout résultat inférieur marquerait l'échec de la tentative de créer un parti républicain ni de gauche ni de droite.

- 6 La droite modérée

En dépit de la création de l'Union pour la majorité présidentielle, la droite modérée se présente assez divisée en raison d'un côté de nombreuses dissidences et de l'autre de la concurrence de l'UDF dont les candidats sont parfois investis par l'UMP, parfois soutenus, parfois ni investis ni soutenus mais sans concurrents UMP et enfin engagés dans des primaires. C'est donc le score global de l'UMP, de l'UDF et des divers droite qu'il faut examiner. Lors des élections législatives de 1997, le RPR, l'UDF et les divers droite avait recueilli 36,2 % des suffrages exprimés. Lors du premier tour de l'élection présidentielle, François Bayrou, Jacques Chirac, Alain Madelin et Christine Boutin ont cumulé 31,8 % des voix. Tout le problème est de savoir quelle va être la dynamique née de la réélection de Jacques Chirac et de la formation du gouvernement. Si la droite modérée n'obtenait que 36 % des suffrages, on devrait parler d'échec. Un score de 39 % serait un résultat tout juste moyen. En revanche, un résultat autour de 42 % serait un triomphe et annoncerait une majorité écrasante à l'Assemblée nationale.

- 7 L'extrême droite.

Jean-Marie Le Pen et Bruno Mégret ont obtenu 19,2 % lors du premier tour de l'élection présidentielle soit 4 points de plus que le score du seul Front national lors des élections législatives de 1997 (15,3 %). L'expérience de 1988 et de 1995-1997 a montré que l'électorat du Front national était, en général, fidèle tant il est structuré par des motivations spécifiques (immigration et insécurité notamment). La situation de 2002 est un peu particulière. D'un côté le souvenir du second tour de l'élection présidentielle, référendum contre Jean-Marie Le Pen peut contribuer à mobiliser l'électorat d'extrême droite autour des candidats FN ou MNR. De l'autre, la réélection de Jacques Chirac et surtout les discours du gouvernement Raffarin sur la sécurité peuvent attirer une partie des électeurs pressés par ailleurs d'éliminer la gauche pour au moins cinq années. Si l'extrême droite atteignait seulement 14 % des suffrages, on pourrait parler d'un certain reflux et d'un certain succès de la stratégie gouvernementale. Un score de 17 % serait la confirmation de l'influence de l'extrême droite. Enfin un résultat autour de 20 % montrerait que celle-ci peut toujours progresser.

Au sein de cet ensemble, il faut par ailleurs surveiller le score du MNR. En ne recueillant que 2,3 % des voix lors de l'élection présidentielle, Bruno Mégret a échoué à implanter une droite extrême plus respectable que le FN. La personnalité de Jean-Marie Le Pen le freine dans ses ambitions. Réussira-t-il mieux dans le cadre d'un scrutin où le président du FN est moins en première ligne et où lui-même dispose d'un appareil partisan ainsi que d'un réseau d'élus ?

- 8 L'équilibre droite gauche

Comme lors des élections législatives de 1997 (51,5 %), les droites (droite modérée et extrême droite) ont été majoritaires lors du premier tour de l'élection présidentielle (51 %). En 1997, les gauches (extrême gauche, PCF, PS, PRG, MDC, divers gauche, Verts) avaient atteint 44 % des suffrages mais elles n'atteignaient que 37,2 % lors de l'élection présidentielle (42,8 % si on y inclut Jean-Pierre Chevènement). Pour gagner cette fois la gauche doit s'assurer au moins 45 % des voix; pour que l'UMP et ses alliés l'emportent, l'ensemble des droites doivent convaincre au moins 55 % des électeurs qui vont aux urnes


Libération - 17/06/2002 - Après la gauche plurielle, la gauche plus rien - Par Renaud DELY


A 39,2 %, le taux d'abstention atteint un nouveau record pour un deuxième tour de législatives

L'UMP obtient la majorité absolue, le PS évite le naufrage de peu, mais ses alliés ont souffert.

Pas de sursaut de la gauche, pas non plus de véritable amplification du succès annoncé de la droite, le second tour des élections législatives apparaît surtout comme une confirmation du premier. Avec en toile de fond un vrai raz de marée... de l'abstention, qui bat un nouveau record en atteignant 39,2 % des électeurs inscrits.
Assurée dès le 9 juin, la victoire de la droite s'est concrétisée hier par une majorité absolue de l'UMP. Selon les estimations disponibles à 23 heures, la nouvelle formation chiraquienne obtiendrait environ 370 députés, la majorité étant fixée à 289 sièges. Une large marge à laquelle il convient d'ajouter les 20 à 25 sièges glanés par l'UDF de Bayrou, qui réussit son pari de constituer un groupe autonome au Palais-Bourbon.
Plus inattendu, le PCF, malgré l'échec de son président, Robert Hue (5e du Val-d'Oise), sauve lui aussi son groupe parlementaire en dépassant de justesse la barre des 20 députés. Le Parti socialiste et les divers gauche, qui disposaient de 254 sortants, ne conserveraient, eux, qu'environ 160 sièges. Les Verts, qui avaient obtenu sept élus en 1997, ne décrochent cette fois-ci que trois députés.
Quant aux chevènementistes du Pôle républicain, décimés, ils n'obtiennent aucun élu, Jean-Pierre Chevènement lui-même étant nettement battu dans la 2e circonscription du Territoire de Belfort. Manque de réserves. Le FN ne fait pas mieux: l'extrême droite avait empoché un élu en 1997, elle échoue cette fois aux portes de l'Assemblée, le maire d'Orange, Jacques Bompard, étant nettement devancé par le sortant Thierry Mariani (UMP) dans la 4e du Vaucluse, tandis que Marine Le Pen est écrasée par le sortant PS Bois dans la 13e du Pas-de-Calais.

En moyenne, les 469 duels droite-gauche (sur 519 sièges qui restaient à pourvoir) qui se sont déroulés hier ont accordé 52,5 % des voix à la droite, contre 47,5 % à la gauche. Au total, si la gauche n'est pas parvenue à redresser une situation compromise au premier tour, c'est d'abord qu'elle n'a pas trouvé de secours du côté des abstentionnistes du 9 juin. Pis, l'abstention a progressé hier de plus de 3 points par rapport au premier tour, où elle s'était élevée à 35,58 %.
Le même phénomène s'était déjà produit à trois reprises, en 1967, 1968 et 1993: à chaque fois, la participation avait fléchi de deux points d'un tour à l'autre. Mais l'abstention demeurait alors confinée à des niveaux nettement moins importants. Il y a cinq ans, elle avait même reculé de trois points en une semaine pour s'établir à 28,54 % au second tour. Pour sauver les meubles, le PS plaidait sans relâche depuis une semaine pour un «rééquilibrage de la démocratie», afin de conjurer le spectre d'une déferlante UMP. En vain. Malgré les supplications, les renforts ne sont jamais arrivés. Parachutages. Ils auraient pourtant pu inverser l'issue d'une soixantaine de joutes serrées dont le sort s'est joué à moins de deux points d'écart.

L'incapacité de la gauche à trouver des secours a été fatale à de nombreux poids lourds socialistes battus de peu, comme les anciens ministres Martine Aubry (5e du Nord) ou Pierre Moscovici (4e du Doubs), le président de l'Assemblée nationale, Raymond Forni (1re du Territoire de Belfort). Les grands anciens, comme le maire de Montpellier, Georges Frêche (2e de l'Hérault), ou Louis Mexandeau, déboulonné dans la 2e du Calvados, et les jeunes pousses de la «génération Jospin» de 1997, tel le porte-parole du PS, Vincent Peillon (3e de la Somme) ou Marisol Touraine (3e d'Indre-et-Loire), se retrouvent côte à côte dans la galère de la défaite.
En revanche, malgré la visite du tandem Bernadette Chirac-Jean-Pierre Raffarin venu soutenir son adversaire jeudi, le premier secrétaire du PS, François Hollande, est parvenu à conserver son siège. D'autres ténors doivent leur survie électorale à un parachutage réussi, comme Jack Lang dans la 6e du Pas-de-Calais ou Elisabeth Guigou dans la 9e de Seine-Saint-Denis, une manoeuvre ratée à l'inverse par Marie-Noëlle Lienemann battue, avec son suppléant Jacques Mellick, dans la 9e du même département. PCF en sursis. Etouffés au premier tour au profit du PS par la mécanique du «vote utile», les Verts ne se sont pas refait une santé hier. De leurs 39 candidats en lice au second tour, seuls trois, Noël Mamère (3e de Gironde), Martine Billard (1re de Paris) et Yves Cochet, qui a quitté le Val-d'Oise pour le XIVe arrondissement de Paris, l'ont emporté. Leurs cinq autres députés sortants, dont Voynet (3e du Jura) et Hascoët (7e du Nord), se sont inclinés. Des anciens partenaires de la défunte gauche plurielle, c'est finalement le PCF qui s'en sort le mieux. Lessivés à la présidentielle (3,37 % des voix pour Hue), laminés au premier tour des législatives (4,91 %), les communistes réussissent cependant à sauver un groupe autonome à l'Assemblée. Forts de la bonne implantation de la plupart de leurs 35 sortants, ils parviennent à conserver plus de 20 sièges.
Seuls 37 candidats FN s'étant maintenus au second tour, les 12,5 % d'électeurs d'extrême droite se retrouvaient privés de champion dans 482 circonscriptions. Si un gros tiers de l'électorat lepéniste semble s'être réfugié dans l'abstention, une bonne moitié aurait rallié hier le camp de l'UMP, une frange suffisante pour causer la défaite de nombreux sortants socialistes. C'est le cas, par exemple, du maire de Mulhouse, Jean-Marie Bockel, battu dans la 5e circonscription du Haut-Rhin, du patron de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, Michel Vauzelle (16e des Bouches-du-Rhône) ou encore de Gérard Lindeperg (1re de la Loire).
Bastion parisien. Comme aux municipales de mars 2001, Paris fait figure d'exception en s'inscrivant à contre-courant du mouvement national. La gauche, qui y disposait de neuf sortants, enlève trois nouveaux sièges: deux pour les Verts, Martine Billard et Yves Cochet, et une pour le PS, la maire du XVIIIe arrondissement, Annick Lepetit, devançant dans la 17e circonscription l'ex-directeur adjoint de la campagne présidentielle de Chirac, Patrick Stefanini. Minoritaire à l'Assemblée, la gauche devient, pour la première fois, majoritaire en sièges dans la capitale avec 12 députés sur 21. De quoi faire de Paris sa base de résistance comme elle fut, pendant 18 ans, celle de Chirac.

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